Le tatouage: une lecture psycho - anthropologique
Issue 3
à des époques où l’homme primitif adorait certains animaux et craignait certaines manifestations de la nature comme la houle, le vent, la pluie ou le tonnerre. Quelques rémanences de ces peurs ancestrales subsistent dans le psychisme humain, malgré les progrès de la civilisation. Car, après que les religions primitives ont disparu, que les yeux et la raison des hommes se sont ouverts sur l’adoration d’un Dieu unique, que l’agriculture, la fabrication des objets, puis l’industrie, l’urbanisme ont connu l’essor que l’on soit et donné à l’humanité la stabilité et, dans une large mesure, une protection contre les menaces de la nature, l’homme n’en est pas moins resté attaché à la pratique du tatouage. Une telle survivance des temps anciens, alors que le progrès avait investi tous les domaines de la vie, montre assez que l’être humain ne s’est pas totalement libéré de l’impact émotionnel de la nature, avec ses secrets et ses dangers, pas plus qu’il n’a éliminé tout un héritage de croyances et de coutumes vieilles comme le monde.
L’étude souligne que le tatouage, en tant qu’ornement et médication, témoigne de certaines croyances, qui ont cours parmi les tribus qui vivent dans les profondeurs des forêts de l’Afrique et de l’Amérique latine, selon lesquelles cette pratique leur garantit l’équilibre physique entre le bien et le mal, autant qu’elle constitue un rempart contre les maladies et les démons qui cherchent à pénétrer à l’intérieur du corps et à causer toutes sortes de maux. Les anciens Arabes qui vivaient dans la Presqu’île arabique et en Syrie plaçaient des tatouages sur le visage et les tempes de la personne qui souffrait de névralgies. Ils faisaient de même avec le dos, les mains et les pieds, lorsque la douleur touchait la colonne vertébrale et les articulations. Cette coutume est encore observée dans les villages et campagnes de l’Irak où les guérisseurs se chargent de tatouer les zones douloureuses du corps. Cette pratique, appelée là-bas ad-dakka – existe aussi en Haute Egypte et dans certaines régions du Sahara, en Afrique du Nord.
Le tatouage au henné continue à être pratiqué dans la plupart des pays arabes, parmi les femmes et les jeunes filles, en particulier lors des cérémonies de mariage. Dans les milieux pauvres, il fait office de parure. Ici, l’étude souligne que les jurisconsultes de l’Islam considèrent le tatouage comme un péché car il dénature la création de Dieu et constitue une atteinte injustifiable au corps que le Très-Haut a confié en dépôt à l’homme. L’auteur aborde ensuite le développement du tatouage, avec le recours aux technologies modernes, et notamment au laser qui permet de graver plus de trois mille points à la minute sur la peau, alors que, la main de l’homme ne peut, dans le même laps de temps, dépasser cinq à dix points. Il note que cette innovation n’a pas seulement influencé les techniques du tatouage, mais a également eu un impact sur les dessins eux-mêmes, les formes et les couleurs se diversifiant à un rythme accru, en arrivant même à reproduire des oeuvres de Picasso, Salvador Dali ou Botticelli, alors que dans le passé les tatouages se limitaient à des formes simples, figurant des lions, des dragons ou des serpents.
sur cette pratique sont les marins, les détenus, les clochards et autres enfants des rues, ainsi que les gitans. L’auteur souligne, dans ses mises en garde, qu’il est très difficile de supprimer les tatouages. Même le traitement au laser demande des semaines et laisse toujours des traces visibles qui, en fin de compte, ne disparaissent jamais tout à fait. Il signale également les dangers de cette pratique pour la santé, car elle peut exposer le corps à des virus susceptibles de provoquer l’hépatite, le sida, diverses maladies bactériennes, le cancer de la peau, etc.
Dr. Barakat Mohammad Murad - Egypte