MONDIALISATION ET SPECIFICITE CULTURELLE

La mondialisation est considérée comme un des grands tournants de l’Histoire. Ses effets sont aujourd’hui visibles dans tous les aspects de la vie humaine. Ils ne touchent pas seulement à l’économie et au commerce mais également, et de façon tout aussi profonde, à la technique, à la politique, à la culture, à l’idéologie.  La mondialisation a imposé de nouvelles valeurs, des normes inédites, selon des planifications qui lui sont propres. Dans toutes les régions du monde elle a transpercé sur une large échelle toutes les structures historiques, nationales, géographiques, démographiques, sociales, culturelles.

Elle développe aujourd’hui avec des moyens gigantesques une nouvelle forme de narration des faits à l’échelle de notre planète, générant au quotidien ses propres vérités avec une force qui est celle de l’influx économique et du développement accéléré des techniques, des sciences et de l’information qu’elle a entraînés.

Aujourd’hui, la mondialisation remet en question toutes les données traditionnelles, toutes les idées héritées du passé, tous les systèmes symboliques qu’elle soumet à examen. Cette évolution a suscité un nombre infini d’hypothèses et de problématiques, offrant de par son caractère globalisant et de ses multiples répercussions, un vaste champ de réflexion aux écrivains, aux philosophes, aux sociologues qui sont interpellés avec insistance et invités à repenser selon d’autres modalités la dialectique de l’existence humaine dans sa totalité, ainsi que le sens de la vie et de son devenir, les fondements structurels de la civilisation et des rapports entre les hommes, l’éternel conflit entre les pulsions matérialistes et les aspirations spirituelles les plus hautes.

Soulignons, ici, que la mondialisation n’est pas imposée par la contrainte, elle colonise la pensée des hommes, en tant que celle-ci est un processus ayant des dimensions culturelles, en s’y insinuant à travers des formes très douces de pénétration culturelle. C’est ainsi, d’ailleurs, que l’on comprend que certains chercheurs aient parlé de « force tranquille » ou d’un « nouveau fascisme au visage souriant ».

La catégorie la plus exposée aux courants de la mondialisation, celle qui est ciblée en premier lieu, est la jeunesse que la mondialisation atteint à travers l’éducation, l’information, les ordinateurs, l’internet. Férus de modernité et passionnés par toutes les innovations, les jeunes sont les plus sensibles aux toutes dernières inventions, les plus enclins à consommer les formes culturelles les plus récentes que leur prodigue la mondialisation. Or ce sont eux le présent et l’avenir de l’humanité.

Maintenant que la mondialisation a, sur des décennies,  graduellement établi son empire sur l’ensemble des régions du monde, il nous incombe d’en examiner attentivement les significations et d’avoir une plus claire conscience de ses manifestations et de ses effets afin de nous former une vision objective de sa réalité, d’assimiler toute la puissance des changements qu’elle induit et de choisir les voies et moyens les plus importants pour en affronter les défis. C’est ainsi que nous nous mettrons véritablement au diapason des évolutions de notre monde, et que nous pourrons comprendre où nous sommes et comment nous positionner de façon effective sur la carte de la planète. Cela est d’autant plus important que la région arabe, qui occupe une place essentielle sur cette carte, en raison de ses richesses pétrolières et de son potentiel humain, se trouve aujourd’hui au cœur des grandes stratégies des parties exposées aux plus vastes mutations, dans le cadre de cette nouvelle mondialisation.

Zahi Nadher
Liban