Revue Spécialiséé Trimestrielle

LE CONTE POPULAIRE STRUCTURE ET SIGNIFICATION

Issue 40
LE CONTE POPULAIRE STRUCTURE ET SIGNIFICATION

Dr Rachid Ouadigi

Maroc

 

Le conte populaire constitue une forme narrative qui a une place à part à côté du conte merveilleux, du conte humoristique et du conte légendaire. Il ne s’agit nullement d’une catégorie générique derrière laquelle se rangeraient les genres narratifs précités ainsi que l’affirment certains chercheurs, car c’est la nature des événements et des péripéties tout autant que la qualité des héros et les finalités poursuivies qui déterminent le genre de tel ou tel conte. Du moins est-ce là la conclusion à laquelle l’auteur estime avoir abouti sur la base de l’approche fonctionnelle qui définit la fonction et la finalité du conte, tout en s’appuyant sur la lecture thématique qui se fonde sur le sujet du conte et sur la méthode morphologique qui met l’accent sur sa structure interne. La conjugaison de ces approches a permis à l’auteur de décrire et de classer les différents types de contes populaires. En fait, la question de la terminologie n’a pas encore été tranchée : certains continuent à appeler ces récits contes oraux plutôt que contes populaires, d’autres les rangent dans la catégorie des récits argumentatifs ou des récits légendaires. 

De façon générale, la littérature populaire – dont fait partie le conte – a un caractère plus ‘’démocratique’’ que la littérature écrite car elle diffuse l’information et l’expérience auprès du public sans la moindre discrimination, contrairement à l’écrit qui exige l’accès à la lecture, excluant de fait une partie importante de la société.

Le conte populaire se caractérise, en premier lieu, par sa diffusion orale dans les milieux populaires. N’étant pas fixé à l’intérieur d’une forme écrite, ce type de récit est constamment exposé à des ajouts et à des suppressions au gré du contexte et de l’expérience des conteurs. C’est donc un récit en perpétuelle métamorphose. Ce conte est, en deuxième lieu, l’œuvre d’un auteur inconnu ou d’un récitant qui nous transmet un récit qui est à la fois la propriété de tous  et de personne. Le conte populaire est, en troisième lieu, dans son principe lié à la parole et c’est pourquoi il est au fondement d’une ère qui fut celle de l’écoute attentive, contrairement à l’ère de l’image dans laquelle nous vivons et qui se base sur le spectacle et la vision. Il a, en quatrième lieu, un lien étroit avec les grands-mères et les mères, terreau fécond pour l’activité de la raison féminine.

L’auteur s’interroge, au terme de cette réflexion, sur les racines du conte populaire. S’agit-il de mythes qui se sont modifiés avec le temps ? Ou d’adaptations et de recompositions des textes fondateurs de la littérature populaire, comme Les Mille et une nuits, Kalilah et Dimnah, le récit de Hay ibn Yqdhân, celui de Seïf ibn Dhi Yazin et d’autres textes narratifs du même type ? Ou encore, tout simplement, de récits tissés par l’imaginaire populaire autour d’un événement ou d’une valeur éthique que les aïeux ont transmis aux générations suivantes ? Que dire, d’autre part, de la normativité dont le conte est porteur : n’éloigne-t-elle pas le récepteur de la réalité et n’opère-t-elle pas comme une drogue dans la mesure où l’on y voit toujours le faible qui triomphe du fort et le bien du mal ? Si, d’autre part, le conte populaire représente une des sources importantes de la littérature pour enfants pourquoi est-il totalement absent des programmes scolaires ? S’agit-il d’une exclusion voulue ou involontaire, sachant, par ailleurs, que l’enfant qui s’approprie ce type de récit développe le don de la parole en continu, et peut dès lors accéder au langage et à l’essence du texte narratif qu’il soit maghrébin ou universel. De même, le conte n’est-il pas de nature à atténuer l’énorme stress induit par la mondialisation ?

Ces réflexions représentent une somme d’interrogations que l’auteur se propose d’aborder dans le cadre d’une nouvelle étude.

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